Renaud MENERAT : "il faudra conjuguer intelligence artificielle et internet des objets"


PDG de UserADgents et de Joshfire, Renaud Menerat revient sur les projets menés par ses agences dans le domaine des objets connectés, et sur la nécessité de s'appuyer sur l'internet des objets pour s'engager dans l'automatisation des services grâce à l'intelligence artificielle...



Quelles sont les principales difficultés auxquelles sont confrontés les créateurs d'objets connectés ?
 
RM - Nous travaillons sur la conception de divers objets connectés comme un majordome, que l'on peut placer sur son portail, ou différents dispositifs dans la e-santé.
 
La première problématique à laquelle sont confrontés les concepteurs d'objets connectés est tout simplement celle de les faire fonctionner correctement. Dans le domaine de la santé connectée par exemple, certains capteurs peuvent fournir de fausses données, ou ne pas fonctionner dans certains environnements. Il ne faut donc pas sauter les étapes et bien réussir son prototypage en conditions réelles avant d'envisager une mise sur le marché. Dans la santé, les procédures cliniques sont très longues et peuvent durer plus de 6 mois.
 
Et une fois que son objet fonctionne et qu'on parvient à le connecter à son smartphone, la seconde étape est de réussir son interconnexion avec d'autres objets connectés. Il existe aujourd'hui une grande variété de technologies qui ne sont pas toujours compatibles entre elles, mais les créateurs d'objets connectés ont désormais la possibilité d'utiliser des SDK universels comme WeCross pour s'interfacer avec les différents écosystèmes en cours de constitution (Google Nest, Apple Homekit, etc…)
 
Peut on vendre un objet connecté comme on vend un objet traditionnel ?
 
RM - Les réseaux de distribution ont tendance à s'élargir. Pour un objet connecté dans le domaine de la e-santé, il faut aller au delà des réseaux de pharmacies ou de parapharmacie pour travailler avec les grandes enseignes d'électronique grand public telles que la FNAC, Darty ou Boulanger. Et à l'inverse, des marques d'électronique grand public, longtemps cantonnées à ces mêmes enseignes, peuvent également tenter leur chance dans des réseaux de distribution spécialisés.
 
Outre ce volet distribution, il faut aussi accorder une attention toute particulière à l'emballage et surtout à l'expérience utilisateur lors de l'ouverture de son produit. Il n'y a pas si longtemps, un objet électronique était vendu avec un mode d'emploi de plusieurs centaines de pages. Aujourd'hui, ça se limite le plus souvent à un petit bout de papier qui nous invite à télécharger une application. C'est une étape essentielle, qui conditionne non seulement le fonctionnement de l'objet connecté, mais au delà toute la relation que la marque va pouvoir construire avec ses clients. Si ça se passe mal, l'objet restera au fond d'un tiroir. Si ça se passe bien, non seulement il sera utilisé, mais la marque pourra construire une relation durable avec son client.
 
 
Au delà de l'interconnexion des objets, le véritable enjeu est-ce l'introduction de nouveaux services ?
 
RM - C'est effectivement l'ambition des concepteurs d'objets connectés : le thermostat devient un outil pour réaliser des économies d'énergie, la balance permet de perdre du poids, le GPS de gagner du temps, etc… L'objet devient secondaire au profit du service.
 
Mais avec la multiplication d'objets souvent vendus par des constructeurs différents, l'enjeu c'est de pouvoir les synchroniser voire de les programmer pour qu'ils fonctionnent tous de manière cohérente. Le thermostat doit pouvoir fonctionner avec un détecteur de présence, la balance avec un autocuiseur, le GPS avec une ouverture de porte, etc…
 
Hélas les consommateurs n'ont que très rarement l'envie ou la capacité de programmer ces scénarios même très basiques. Le succès de ces nouveaux services passera sans doute par l'adoption des technologies d'intelligence artificielle ou de machine learning, qui demanderont simplement une confirmation par l'humain, plutôt que la création de scénarios.
 
La France est elle trop frileuse en matière de protection des données ? Est-ce que cela peut constituer un frein à l'innovation ?
 
RM - C'est possible. Dans un récent article, Gilles Babinet expliquait par exemple que nous contrôlions tellement les données de santé que nous n'étions même pas capables de voire le développement d'une épidémie en temps réel. Nous pouvons sans doute continuer à exiger une anonymisation des données mais faire preuve de plus de souplesse dans leur usage, en expliquant bien le bénéfice que peut en attendre le consommateur.
 
De grands groupes américains comme Apple sont d'ailleurs assez volontaires. Lors de l'activation de son smartphone, on a tendance à accepter par défaut le partage de nombreuses données, et ensuite Apple peut s'en servir non seulement pour nous localiser, mais également pour alimenter son intelligence artificielle en nous invitant par exemple à quitter notre domicile plus tôt pour être à l'heure à notre rendez vous.
 
A l'avenir il faudra ainsi certainement conjuguer l'internet des objets avec l'intelligence artificielle pour offrir la meilleure expérience à ses clients.

Interview extraite du guide IOT de la Mobile Marketing Association France


Pionnier de la presse en ligne avec le lancement de NetEconomie.fr en 1999, Jérôme Bouteiller est… En savoir plus sur cet auteur

Mercredi 2 Novembre 2016

A lire également