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Francescu Santoni, Mojo : « Les videos courtes sont en train de remplacer les story »


Co-fondateur de Mojo, Francescu Santoni revient sur le succès de Mojo, une application qui revendique plus de 40 millions de téléchargements dans le monde, et qui accompagne les mobinautes dans la création de story et de vidéos courtes.



JB -  Bonjour à toutes et à tous, On est très content de recevoir Francescu Santoni. Bonjour Francescu.
 
FS - Bonjour Jérôme, très content d'être là.
 
JB - Tu es le co-fondateur de Mojo, une des applications qui a connu l’une des plus belles croissances sur le marché français des applications ces dernières années. Plus de cinq ans après sa création, comment se porte l'entreprise ? Et est ce qu'on peut partager quelques métrics ?
 
FS - Oui, c'est vrai que ça fait plus de cinq ans maintenant qu'on a lancé Mojo avec une aventure un peu extraordinaire. Beaucoup, de croissance, beaucoup de hauts, quelques bas aussi évidemment. La vie d'entrepreneur n’est pas et pas toute lisse.
 
Aujourd'hui, pour partager quelques chiffres, on a dépassé les 40 millions de téléchargements au total depuis la création de l’application et on a également dépassé les 15 millions de dollars de revenus annuels. Donc ça va bien.
 
JB - Ça veut dire que vous avez beaucoup d'abonnés payants désormais ?
 
FS - Oui, on a plus de 300 000 abonnés payants. Eh bien, un très, très beau succès.
 
JB - Comment êtes vous parvenus à atteindre de tels chiffres ? C'est rare pour les applications de parler en millions.
 
FS - Oui, c'est assez rare mais ça l'est peut être de moins. Contrairement à ce qu'on peut parfois imaginer, le mobile et la vidéo sont des marchés encore,  en très forte très forte croissance.
 
C'est aussi très international. Un tiers de nos revenus se font aux Etats-Unis. Ensuite, on est au Brésil, une grande partie de l’Europe, donc c'est très international. Et comment on y est arrivé ? Alors ..
 
Plusieurs choses. La première - très importante pour nous - était le coup de pouce d'Apple. Ça fait plus de quinze ans que je fais des applications iOS, et  je crois beaucoup en l’iPhone et à l'écosystème App Store.
 
Et quand on a créé MoJo, Apple a cru en nous et nous a fait participer à plusieurs programmes en France, dont un à station F, le programme Fondation. Ils nous ont également un peu poussé sur le store, français pour commencer, puis dans les stores internationaux et on a pu avoir pas mal de mises en avant. Donc voilà, un grand merci à eux car ils continuent aujourd'hui à croire en nous.
 
Ensuite, tu as une dimension un peu plus organique qui vient de deux effets qui conjointement nous donnent une sort de "cheat code", de superpouvoir.
 
Le premier, c'est que le contenu qu’on crée avec Mojo est un peu hors du commun et c'est du contenu qui ressemble vraiment à du contenu de designer. Et quand les gens créent sur les réseaux sociaux, leurs followers se demandant comment ils font.
 
Pas plus tard qu’hier, on m'a envoyé une capture d’écran d'un compte Instagram d'une personne qui crée beaucoup de contenu. Et au fil des années, cette personne avait révélé à 20 ou 30 personnes qu'elle avait créé ces vidéos avec Mojo.

Nos utilisateurs sont des créateurs de contenus avec de la visibilité. C'est le deuxième effet : quand ils créent leurs contenus, les gens leur demandent comment ils ont fait.
 
JB - ... donc beaucoup de bouche à oreille, un cercle vertueux pour une croissance organique...
 
FS - Ça, c'est la croissance initiale, effectivement. Mais aujourd'hui, on s'est un peu plus structurés, professionnalisés. On a une grande partie aussi, évidemment, marketing payant qui est fait de façon ce qu'on appelle ROIste, donc rentable.

C'est important pour nous. On est on est une boîte qui grandit et qui croît très vite. Mais en fait, ce qui s'appelle plutôt de la sustainable growth, on est là pour le long terme. On veut vraiment changer la façon dont les gens créent des vidéos.
 
Donc on investit aussi de plus en plus dans la pub, tout simplement sur les réseaux sociaux, sur TikTok, Meta et l'App Store Search. Aujourd'hui, la pub est devenue notre vecteur de croissance principal,
 
JB - Alors Mojo, c'est évidemment un super outil pour pour maximiser sa présence sur les réseaux sociaux, vous avez notamment beaucoup cru aux story très tôt, on peut dire 30 ans après le web, quinze ans après les applications natives, les stories, c'est un peu le mode d’expression naturel pour la nouvelle génération.
 
FS - En fait, les stories, ça peut être utilisé comme terme pour exprimer plusieurs formats différents.
 
Il y a les stories telles qu’on les connaît qui sont en train d’être surpassées un petit peu par  ce qu'on appelle les short vidéos, les vidéos courtes. On pense au Reels, on pense aux tiktok, aux YouTube short.
 
Mais en fait, ce qui est resté des stories, c'est ce qui a vraiment impacté durablement la vie du web, on va dire de l'Internet et du mobile.

C'est une tendance qui consiste à créer un contenu immersif, vertical parce que l'écran est vertical, court, et donc le visionnage est contrôlé par l'utilisateur.
 
C'est à dire qu'on a des petits chapitres courts, et ça c'est quelque chose qui vraiment définitivement crée un tournant, dans l'univers du mobile et  dans les usages de millions de gens.
 
JB - Alors avant de parler de vidéo, Google a récemment dévoilé un format AMP : Les story AMP. Est ce que ces stories, qui sont évidemment incontournables sur les grandes applications sociales, est ce qu'on pourrait aussi les retrouver sur le web ? Je pense à des marchands ou à des médias qui voudraient exploiter ce format là.
 
FS - Il y a eu beaucoup de tentatives pour amener les stories sur le web. Moi même, il y a cinq ou six ans, j'étais assez favorable et j'y croyais beaucoup.
 
Mais pour l’instant, il n'y a rien qui tient. Pour être honnête, Il y a quelques tentatives, notamment au niveau du e-commerce avec quelques applications qui sont sorties et qui ont prouvé que ça avait des meilleurs taux de conversion. C'est une consommation qui est un peu plus efficace, on va dire, notamment pour un usage mobile.
 
Mais aujourd'hui, les stories AMP, les news sont quand même encore surpassées par les réseaux sociaux de style Twitter/X pour les news un peu fraîches ou les vidéos de format court. Sur Tiktok on retrouve beaucoup de formats média et on peut dire que c’est aussi un peu les nouvelles stories média aujourd'hui.
 
JB - Alors effectivement, tu l’évoques, il y a un boom de la vidéo, notamment grâce aux Reels d'Instagram ou aux formats tiktok. Sur Mojo, on voit plein plein de nouvelles fonctionnalités, notamment les sous titres, le montage automatique. C'est un pivot, une nouvelle dynamique de croissance pour vous ?
 
FS - Alors oui. La vidéo, c'est un marché qui change très vite. Notre mission cœur et cible qui elle ne change pas, c'est de permettre aux gens d’être créatifs et de créer du contenu incroyable sans avoir des connaissances techniques particulières.
 
On aime bien dire qu'on a envie de mettre une agence de design un peu dans la poche de tout le monde parce qu'on pense que beaucoup de personnes sont créatives et en fait ont envie de créer elles mêmes. Mais elles n'ont pas ces compétences.
 
Au départ, Mojo c'était effectivement des posters animés type story classique. Aujourd'hui, on se dirige beaucoup plus vers du montage vidéo avec des vidéos courtes comme comme j'en parlais un peu plus tôt, et pour donner un exemple de chiffre, en 18 mois, on est passé de 90 % de partage de stories Instagram à moins de 20 %.
 
JB - Un vrai changement dans les usages. Néanmoins, les grandes plateformes, elles, investissent également dans des logiciels. On peut citer CapCut de TikTok qui cartonne aussi. votre valeur ajoutée, c'est d'être multi-plateforme et de pouvoir accompagner les créateurs, quelle que soit la destination et les aider à devenir multi-plateforme.
 
FS - Alors effectivement, CapCut c'est un très bon exemple. C'est d'ailleurs une super application qui a été créée par TikTok. Nous, on est effectivement multi-plateformes, donc on peut partager sur toutes les plateformes, mais on aussi a une approche qui est beaucoup plus accessible et orientée "beauté" si je peux me permettre.

CapCut reste un éditeur un peu plus classique et standard, qui permet de faire pas mal d’utilitaires dans le montage vidéo, mais un peu moins la partie visuelle esthétique, en tout capcut peu moins dédiée à ça. Et c'est aujourd'hui, on va dire, notre plus grande valeur ajoutée.

Mais effectivement la partie multi formats. C'est à dire que aujourd'hui dans Mojo, on peut créer un contenu, un format donné, on va dire TikTok, mais on peut aussi ensuite le passer en mode carré pour le partager sur LinkedIn ou sur Twitter / X.
 
JB - Parmi les utilisateurs de Mojo, combien Multi postent et ont envie de développer leur communautés simultanément sur différentes plateformes ?
 
FS - Alors ça, ça dépend vraiment du type d’utilisateurs. On va dire que dans nos utilisateurs, on a notamment beaucoup de créateurs de contenus qui, eux, sont plutôt individuellement affiliés à une plateforme qu'ils essaient d'abord de percer "verticalement", c'est à dire d'avoir un nombre d’abonnés ou de vues qui grandit pour ensuite aller s’étaler.  Donc eux, pas tant que ça, tant qu'ils sont pas ultra successful. Désolé pour l’anglicisme. Sinon. Par contre, on a tout un pan des utilisateurs qui sont un peu plus avancés,
 
On pense notamment aux médias, évidemment, on pense aux business un peu plus physiques ou aux marketers, on pense aux community managers. Ceux là, ils vont directement faire du multi format parce qu'en fait, ils ont besoin d'être partout. Ils ont besoin en fait d'avoir quand même un contrôle parce que chaque plate forme est unique . Il faut pouvoir permettre aux gens d'éditer ce résultat là et de l’affiner. Et ça, c'est une partie pour ces utilisateurs qui est très importante.
 
JB - Oui, justement, les pro, les community managers, les médias : est-ce une part grandissante des utilisateurs de Mojo ? 
 
FS - Alors, c'est une part effectivement importante. Le nom de Mojo vient en partie d'un hashtag qui était utilisé par les mobiles Journaliste #Mojo les deux premières lettres de "mobile journaliste". Ils étaient vraiment notre cible au départ puisque de par nos expériences passées, on était bien introduit au sein de cette communauté.
 
Mais au fil du temps, cette communauté a plutôt eu tendance à se réduire, notamment un effet de masse, parce qu'il n'y a pas autant de médias qu'il y a de créateurs.
 
Et en fait, aujourd’hui, ce qui est incroyable, C'est ce qu'on appelle la Creator économie. Alors ça a été utilisé en buzzword pour lever des fonds mais c'est peut être la vague de demain et elle passe un petit peu inaperçue. Il y a aujourd'hui des millions de personnes qui génèrent du revenu grâce à leurs créations vidéos sur les réseaux sociaux.
 
Et leurs créations vidéo leur permettent de générer un revenu direct sur les réseaux sociaux, mis également un revenu indirect avec des livres, pop-up store, des cours en ligne, du coaching, etc.. Et en fait, ça, c'est vraiment une tendance qui est en plein boom et c'est le gros de nos nouveaux utilisateurs. 
 
JB - Mojo permet de poster sur Instagram, TikTok, Facebook, YouTube, Twitter mais est ce qu'il n'y a pas eu à un moment la volonté d'en faire un véritable réseau social ?
 
FS -  C'est vrai que c'est une question qui peut se poser, notamment quand on arrive à créer un certain sens de l'esthétisme qui est un peu différent, peut être d'autres plateformes avec ces millions d'utilisateurs. Mais on avait déjà fait cette erreur, avec une application qui précédait Mojo.
 
On s'est rendu compte que créer un réseau social, c'est un métier à part entière. D'ailleurs en France, certains le font très bien. On peut penser à B-Real, les anciens de Zenly aussi qui créent, qui lancent Amo. J'ai eu la chance de parler avec ces entrepreneurs là. C'est des gens incroyables mais qui ont une obsession envers ce type de produit.
 
Ce qui est important dans la vie d’entrepreneur, c'est de réussir quand on fait une chose, de l'amener très loin en étant vraiment "laser focus" sur là où on peut apporter de la valeur ajoutée. Et dans notre cas, c'est plutôt aider les gens à créer du contenu que de créer une communauté.
 
JB - On a cité Arrow qui était l’application qui avait précédé Mojo et qui faisait précisément de la réalité augmentée il y a déjà six ou sept ans. Est ce l'arrivée du vision pro d'Apple en février, donne des envies de réinjecter un peu de réalité augmentée dans Mojo ?
 
FS - Alors oui, la réalité augmentée, ça a été une passion, il y a dix ans pour nous et on a beaucoup travaillé et été accompagné par Apple sur le sujet.
 
D'un point de vue purement personnel, c'est quelque chose qui m'intéresse énormément. Mais avec l'âge, j'ai également appris la sagesse d'attendre pour ne pas me lancer trop tôt.

Mais ce qui est sûr, c'est que le vision pro d’Apple va définitivement changer la face du monde, notamment de la réalité augmentée. Parce que là, c'est le début. Il y a pro dans le nom, mais on imagine bien que la suite peut bien aller plus loin. Et comme d’habitude, quand Apple fait quelque chose, c’est généralement très très très bien fait. 
 
J'ai pas eu encore la chance de le tester, mais tous les retours que j'ai pu avoir sont exceptionnels, donc j'attends surtout de pouvoir le tester et ensuite effectivement de me poser la question pour comprendre ce que ça change en terme de communication pour le futur .
 
JB - Une dernière question, un peu boule de cristal : à quoi ressemblera Mojo en 2030 ? 
 
FS - Alors question boule de cristal qui va très bien avec la précédente et je pourrais répondre réalité augmentée.
 
Mais avant ça il y a une dimension où on voit qu'on peut mélanger la vie réelle et la vie digitale. On a cité plusieurs boom incroyables le web, le mobile, les stories, la réalité augmentée.  Mais je pense que par dessus tout, ce qui va le plus impacter le monde et donc Mojo, c'est l’intelligence artificielle dite générative. 
 
On travaille énormément là dessus et en fait on va pouvoir créer des formes d’expression complètement nouvelles et permettre de débloquer une forme de créativité encore plus forte et encore plus personnelle.
 
L’intelligence artificielle va permettre de pouvoir exprimer vraiment son côté unique personnel, que ce soit à travers une marque, un média ou juste en tant que créateur de contenus, de façon vraiment totalement nouvelle, entraînée sur sa propre personne et ses propres goûts, son esthétisme.
 
J'ai eu de la chance dans ma vie d’entrepreneur, il y a quinze ans, de connaître l'apparition de l’iPhone et donc la création du mobile. C'est une chance incroyable qui aujourd'hui me passionne encore quinze ans après. 
 
Et j'ai la chance, je pense aujourd'hui d'en voir une deuxième qui est l’intelligence artificielle générative qui peut avoir un impact aussi gros que celui du mobile je pense, et de l'iPhone.
 
JB - Très bien. Merci beaucoup Francescu pour ce témoignage. Et on invite évidemment tout le monde à télécharger Mojo sur les stores. Merci Francescu.
 
FS - Merci !

Télécharger
Mojo sur l'App Store : https://apps.apple.com/fr/app/mojo-editeur-reels-stories/id1434861974
Mojo sur le Play Store : https://play.google.com/store/apps/details?id=video.mojo&hl=fr&gl=US

Jérôme Bouteiller
Pionnier de la presse en ligne avec le lancement de NetEconomie.fr en 1999, Jérôme Bouteiller est... En savoir plus sur cet auteur


Tags : mojo, story
Jeudi 11 Janvier 2024


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